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L'histoire des congés payés!

Publié le 31/07/2015
  Avant la loi du 20 juin 1936, instituant deux semaines de congés payés pour tous les salariés, peu d'employés et d'ouvriers bénéficaient de vacances rémunérées, à la différence de l'Allemagne ou des pays scandinaves qui avaient institué les congés payés dès le début du XXe siècle. Petite histoire d'une grande idée.

48% des Français comptent s'octroyer de « vraies vacances cette année » (au moins quatre nuits). Certes, effet de la crise, ce taux est historiquement bas (ils étaient encore 53% en 2012). Mais que dire alors si, en juin 1936, le gouvernement du Front populaire n'avait pas octroyé à l'ensemble des salariés 15 jours de congés payés. Une véritable révolution, non seulement sur le plan social mais aussi économique avec l'essor de l'industrie touristique.
Avant 1936, le principe des congés payés en France était très limité. Alors que plusieurs pays les avaient déjà instaurés. Il en va ainsi, notamment, en Allemagne dès 1905, en Autriche-Hongrie et dans les pays scandinaves depuis 1910, en Tchécoslovaquie, Pologne, Luxembourg, au début des années 20, puis en Grèce, Roumanie, Espagne, Portugal ainsi qu'au, Chili, Mexique, Brésil, entre la fin des années 20 et le début des années 30.

 

Tout a commencé sous... Napoléon III

En France, donc, les congés payés restent cantonnés à quelques secteurs, malgré diverses tentatives législatives en 1928, 1931 et 1932 pour les généraliser, régulièrement retoquées par le Sénat. Qui sont ces quelques privilégiés ? Les fonctionnaires de l'Etat, d'abord, qui bénéficient depuis un décret impérial du 9 novembre 1853 de Napoléon III de 15 jours de congés payés. En 1900, les salariés du tout jeune métro parisien obtiennent 10 jours de congés payés. En 1905, c'est au tour des salariés des entreprises électriques de se voir gratifier de 10 jours (et même 12 à compter de 1907). En 1906, les salariés des usines à gaz rejoignent les rangs et en 1913 les employés de bureau et de commerce obtiennent une semaine. Après la guerre, le mouvement continue avec la Société des transports en commun de la région parisienne (l'ancêtre de la RATP) qui accorde... 21 jours de congés payés à ses salariés.

Les secteurs de la couture et de la fourrure à l'avant-garde

Beaucoup d'entreprises vivant de la commande publique donc. Mais quelques secteurs du privé pur vont aussi octroyer des congés payés à leur personnel dans les années vingt. Il en va ainsi de la couture où les conventions collectives accordent aux ouvrières une à deux semaines de congés en fonction de l'ancienneté. Idem dans la fourrure. Puis en 1929, un accord permet aux ouvriers du livre de bénéficier de six jours. On remarquera que les ouvriers de la métallurgie et de la sidérurgie restent globalement étrangers à ce mouvement.
A noter aussi que dans l'horlogerie, le fameux et original Fred Lip, dont l'entreprise défrayera la chronique quelques décennies plus tard, accordera les congés payés à tous ses salariés en 1934. Il y a aussi ces patrons sociaux d'Alsace où, avant 1936, près des deux tiers des entreprises accordent des congés annuels à leurs ouvriers. L'influence du «modèle allemand», déjà.
Autre anecdote... significative:  dès 1922, J.J. Durand, directeur technique du journal « L'information », (quotidien politique économique et financier parisien) obtenait de l'administration du journal l'octroi de vacances payées au personnel, démontrant que la solution était avantageuse pour tout le monde. Un certain... Léon Blum écrivait alors des articles pour « L'Information » et découvrit cette initiative qui l'intéressa vivement.
Davantage préoccupée par la durée de la journée de travail, et profondément attachée à la « valeur travail », la CGT n'a inscrit qu'en 1926  le droit à congés payés dans son programme. Mais si cette revendication était réelle ce n'était pas celle qui était mise le plus en avant lors des mouvements de grève ou dans les négociations avec le patronat. Les congés payés n'étaient même pas prévus dans le programme de gouvernement du Front Populaire rédigé en janvier 1936. Même si la SFIO (socialistes) en défendait le principe, ce qui n'était pas le cas du... Parti communiste


Une loi discutée et voté en quelques jours de juin 1936


Avec la victoire du Front Populaire aux législatives du 3 mai, un formidable mouvement de grève éclate. Les revendications portent sur la revalorisation des salaires, la limitation de la durée de travail à 40 heures par semaine... et les congés payés. Léon Blum perçoit l'importance de la demande « d'être payé à ne rien faire » et de profiter du temps libre. Il en fait l'un des sujets mis sur la table de ce qui deviendra les accords de Matignon, conclus entre la CGT et la Confédération générale de la production française (l'organisation patronale ancêtre du Medef) dans la nuit du 7 au 8 juin.

Ensuite, tout va aller très vite. Léon Blum s'appuie sur un haut fonctionnaire de gauche, Charles Picquenard, directeur de cabinet au ministère du Travail, qui est chargé de rédiger un projet de loi en accéléré dans la nuit du 8 au 9 juin.. Le texte législatif est court et simple : la loi s'applique à tous les salariés liés à un employeur par un contrat de travail.. La durée des congés payés est de quatorze jours, dont douze ouvrables, après un an de services continus, et d'une semaine, dont six jours ouvrables, pour six mois de services.

Déposé le mardi 9 juin à la Chambre des députés, le texte est voté le 11 à l'unanimité des 592 votants. Au Sénat, le 17 juin, le vote à main levée est aussi massif pour cette «importante réforme sociale permettant au chef de famille de partager avec les siens les jours de vacances auxquels son travail lui a donné droit». La loi est promulguée le 20 juin. Ainsi, en quelques jours, une réforme sociale considérée comme utopique pendant des décennies est finalement adoptée. On connaît la suite avec ces images des premiers départs massifs (et encore il ne furent qu'environ 600.000 en 1936, puis 1,8 million en 1937), l'essor des colonies de vacances, l'invention des billets SNCF à tarifs réduits, etc...

 

 


2 puis 3, puis 4, puis 5 semaines


Après la guerre, le mouvement va de nouveau s'amplifier. Véritable « laboratoire social » avec, à sa tête, Pierre Dreyfus, la régie Renault accorde à ses salariés, en 1955, une troisième semaine. Et, contre l'avis des pouvoirs publics, une quatrième, sept ans plus tard. Elle entraîne dans son sillage plusieurs autres entreprises. Les gouvernements successifs généraliseront cette mesure par les lois du 27 mars 1956 (Guy Mollet) 3 semaines, puis du 17 mai 1969 (Maurice Couve de Murville), 4 semaines de congés. « Vous n'avez aucun sens de la discipline, mais vous avez bien fait », confiera De Gaulle à Pierre Dreyfus. Enfin, pour l'instant dernier chapitre de cette histoire - si l'on ne tient pas compte des « RTT » - , l'ordonnance du 13 janvier 1982 (gouvernement Mauroy) instaurera la cinquième semaine de congés payés.

 

La Tribune par Jean Christophe Chanut le 13/07/2013

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